mardi 18 novembre 2014

On ne voyait que le bonheur, Grégoire Delacourt.

« Une vie, et j’étais bien placé pour le savoir, vaut entre trente et quarante mille euros.
Une vie ; le col enfin à dix centimètres, le souffle court, la naissance, le sang, les larmes, la joie, la douleur, le premier bain, les premières dents, les premiers pas ; les mots nouveaux, la chute de vélo, l’appareil dentaire, la peur du tétanos, les blagues, les cousins, les vacances, les potes, les filles, les trahisons, le bien qu’on fait, l’envie de changer le monde.
Entre trente et quarante mille euros si vous vous faites écraser.
Vingt, vingt-cinq mille si vous êtes un enfant.
Un peu plus de cent mille si vous êtes dans un avion qui vous écrabouille avec deux cent vingt-sept autres vies.
Combien valurent les nôtres ? »

À force d’estimer, d’indemniser la vie des autres, un assureur va s’intéresser à la valeur de la sienne et nous emmener dans les territoires les plus intimes de notre humanité. Construit en forme de triptyque, On ne voyait que le bonheur se déroule dans le nord de la France, puis sur la côte ouest du Mexique. Le dernier tableau s’affranchit de la géographie et nous plonge dans le monde dangereux de l’adolescence, qui abrite pourtant les plus grandes promesses.
 
Depuis sa sortie cet été, ce roman a beaucoup été commenté sur les blogues.  Je n'ai lu aucun des billets publiés à son sujet et je n'avais pas lu le quatrième de couverture avant d'ouvrir la première page.  J'ai lu ce roman en me fiant au bonheur de lecture que j'avais éprouvé en lisant La liste de mes envies, le roman précédent de Grégoire Delacourt.  OUF!  L'auteur nous entraîne ici dans un registre totalement différent, tellement plus sombre, tellement plus introspectif!  Je vous le dis tout de suite, j'ai eu les frissons dans la dernière page... pas de violence, que du beau, mais en lisant tout le cheminent des personnages derrière ce moment, je me suis demandé si j'aurais été capable d'autant de courage.
 
Difficile de vous parler du dénouement sans dévoiler l'intrigue qui vous bouleversera comme moi, j'en suis certaine.  Il est question de relations complexes entre les membres d'une même famille, mais surtout des failles qui composent chaque relation et dirigent chaque action.
 
"Nous n'avions plus de maman, je crois.  Quand elle est partie, le jour de l'enterrement, elle a emporté avec elle l'idée même d'une famille, d'une maison." (p.193)
 
Beaucoup de mots, beaucoup de descriptions, beaucoup de sentiments, c'est un roman français par ses repères, ses lieux et son langage.  D'ailleurs, j'ai lancé un appel sur FB pour une phrase qui me donne l'impression de parler une langue étrangère.  Les avis étaient partagés, même en France!  Alors, si quelqu'un peut m'expliquer le sens de cette phrase, je serais ravie - "Je te souhaite de caner en baguant" (p.87).
 
Comment un homme qui a semé le bien peut semer le mal?  Antoine est un homme simple qui n'ose pas... Comment a-t-il pu faire cela?  Je vous laisse peut-être en suspens sur cette question, mais c'est un roman très fort sur la psychologie humaine qui se lit en quelques heures.  Moi qui croyais que Grégoire Delacourt était un one time success avec La liste de mes envie, il n'en est rien.  L'homme a de grandes choses à nous raconter et je serai au prochain rendez-vous!
 
ISBN: 9782709647465

5 commentaires:

Alex Mot-à-Mots a dit...

Caner, dans mon patois, c'est mourir. Mais baguer, je ne vois pas. Si tu as la réponse, je suis preneuse.

Marie-Claude a dit...

Ton avis est super intéressant. Moi, j'ai adoré ce livre!
Passe le lire sur mon blogue:
http://hopsouslacouette.blogspot.ca/2014/09/la-lumiere-au-bout-du-tunnel.html
En passant, je passe régulièrement lire tes billets. J'aime ton choix de lecture.

Une ribambelle a dit...

Ici aussi pour moi caner c'est mourir mais en baguant ??? Peut-être que baguer a le sens de se marier.
J'ai le roman que j'ai acheté mais je n'ai pas encore mis le nez dedans.

Jules a dit...

Alex et Ribambelle: c'est une vraie colle hein! Je pense que seul l'auteur le sait!!

M-Claude: Merci pour les compliments! :) J'ai aimé ce livre aussi, mais je ne m'attendais pas à cela de la part de l'auteur...

Noukette a dit...

La liste de mes envies m'avait profondément agacée... Mais celui là... quelle claque !!