« La mer l'a prise », disent les villageois, mais les jeunes enfants de la morte, frêles silhouettes dans la brume, continuent à la chercher sur les plages balayées par le vent. Les vagues effacent vite la trace de leurs pas dans le sable. Tout s'effiloche devant l'océan vaste et funeste, même les souvenirs. Ils ont besoin de comprendre. Ils veulent savoir. Mais à qui s'adresser ? Leur père, pauvre pêcheur éploré, s'est emmuré, lui aussi, dans le silence. Seule la voix de la mer, tel un coryphée, les accompagne dans leur inlassable quête, s'infiltrant partout dans le récit et menant celui-ci aux abords du mythe ou de la légende. Élisabeth, l'aînée, est partie vivre à Montréal dans l'espoir d'échapper à la malédiction qu'elle croit peser sur elle. Claire, déchirée entre la beauté et la férocité des Iles, écrit des lettres à sa soeur lointaine. Leur frère Julien, lui, demeure muet, fasciné par le miroitement des flots et les secrets enfouis dans les profondeurs marines. Sous la plume poétique et musicale de Mylène Durand, le vent, l'océan, les falaises et le sable, tous ces éléments omniprésents aux Iles-de-la-Madeleine, prennent littéralement vie aux côtés des personnages, reflétant leurs sentiments et leurs peurs. « L'immense abandon des plages » est un vers de Marie Uguay, tiré d'un poème cité en exergue au roman.
"Écrire les Îles. C'est impossible. C'est quelque chose de physique, il faut y être. Mon père me comprendrait. Lui qui regarde si loin vers l'infini, où il ne peut s'égarer. Comme si je sentais le vent salé me fouetter le visage. Comme elle." (p.58)
Impossible? Et pourtant, à travers les mots de cette jeune érivaine, on y sent le vent, on le sent nous porter, nous transporter au travers de cette tragédie familiale qui a laissé aux fonds des coeurs quelque chose d'abyssal, de très profond et d'obscur... Un trou béant qui ne pourra jamais se refermer et qui agit contre le pouvoir et le vouloir de Claire, Élisabeth et Julien. Si proches, mais si éloignés en même temps, chacun tente une dernière fois de remonter à la surface, de mieux respirer après le suicide de leur mère, mais y arrivent-t-ils vraiment?
La plume est délicate et violente dans un même jet, elle virevolte entre la poésie et le récit. Elle remue le lecteur comme ces grands coups de vent qu'offre ces Îles magnifiques...
Tous les avis de La Recrue ici.
Objectif PAL # 18
3 commentaires:
Merci pour ce beau billet !
Je craque, il me faudra lire ce livre rapidement !
Marie: il décrit une très belle région du Québec!
il me tente.je vais le noter en esperant qu'on puisse l'avoir en France.
Publier un commentaire