samedi 22 septembre 2007

Tours et détours de la vilaine fille, Mario Vargas Llosa.

Que de tours et de malices chez cette " vilaine fille ", toujours et tant aimée par son ami Ricardo, le " bon garçon ". Ils se rencontrent pour la première fois au début des années cinquante, en pleine adolescence, dans l'un des quartiers les plus huppés de Lima, Miraflores. Joyeux, inconscients, ils font partie d'une jeunesse dorée qui se passionne pour les rythmes du mambo et ne connaît d'autre souci que les chagrins d'amour. Rien ne laissait alors deviner que celle qu'on appelait à Miraflores " la petite Chilienne " allait devenir, quelques années plus tard, une farouche guérillera dans la Cuba de Castro, puis l'épouse d'un diplomate dans le Paris des existentialistes, ou encore une richissime aristocrate dans le swinging London. D'une époque, d'un pays à l'autre, Ricardo la suit et la poursuit, comme le plus obscur objet de son désir. Et chaque fois, il ne la retrouve que pour la perdre. Et, bien entendu, ne la perd que pour mieux la rechercher. Il n'est jamais facile d'écrire l'histoire d'une obsession. Mais la difficulté est encore plus grande quand il s'agit d'une obsession amoureuse et quand l'histoire que l'on raconte est celle d'une passion. Mario Vargas Llosa avait déjà affronté ce défi par le passé dans La tante Julia et le scribouillard (1980), l'un de ses romans les plus populaires. Et voici qu'il le relève encore vingt-cinq ans plus tard et nous offre ce cadeau inattendu : une superbe tragi-comédie où éros et thanatos finissent par dessiner une autre Carte de Tendre entre Lima, Paris, Londres et Madrid. Car Tours et détours de la vilaine fille est bien cela : la géographie moderne d'un amour fou.



"Et dans un élan de confidences, je venais de lui raconter, sans donner de détails ni de noms, que depuis de nombreuses années j'étais amoureux d'une femme qui apparaissait et disparaissait de ma vie comme un feu follet, l'incendiant de bonheur pour de courtes périodes, puis la laissant sèche, stérile, vaccinée contre tout autre enthousiasme ou amour." (p.165)

"Je ne suis ni ne serai jamais ton ami. Tu ne t'en es pas encore aperçue? Je suis ton amant, ton amoureux, quelqu'un qui depuis tout gosse est fou de sa petite Chilienne, de sa guérillera, de l'épouse du fonctionnaire, de celle de l'éleveur de chevaux, de la maîtresse du gangster. Ton pitchounet qui ne vit que pour te désirer et penser à toi. À Tokyo je ne veux pas vivre de nos souvenirs. Je veux te tenir dans mes bras, t'embrasser, respirer ton odeur, te mordre, te faire l'amour" (p.182)

Si ces deux extraits n'arrivent pas à vous convaincre de la fougue et du feu amoureux qui habitent ce bon garçon Ricardo pour cette vilaine fille Lily, c'est peut-être que le romantisme est passé lorsque vous étiez sortis... Une écriture fluide et une histoire d'amour cahoteuse font de ce roman ce que les anglophones appellent un "page-turner". Quatre cent cinq pages d'acceptation-déception, bonheur-malheur, aller-retour qui donnent souvent envie de balancer le bouquin au bout de ses bras tant on aurait envie de brasser tous les personnages une fois pour toute! Réveillez-vous crétins (et crétines!), regardez ce que vous avez devant vous, ce n'est peut-être pas pour vous... Je découvre cet auteur avec beaucoup de plaisir et je dois dire que si sa liste de livres publiés n'était pas aussi riche, je tenterais certainement une cure Llosa! Définitivement un coup de coeur en septembre, probablement au même niveau que "L'élégance du hérisson".

6 commentaires:

Anonyme a dit...

Je dois dire que tout ça me laisse perplexe. Ca a l'air génial et ça a l'air énervant... Je me vois déjà jeter le bouquin par la fenêtre (je ne ferai jamais une telle chose bien sûr!) car le petit Ricardo m'énerve déjà...
Exactement comme l'élégance du hérisson, que je n'ai d'ailleurs jamais eu envie de jeter par la fenêtre.
Mais dans ce cas, je vais m'abstenir je pense ;-)

Anonyme a dit...

Bonjour !
Je suis en train de lire ce roman, et j'adore. Moi aussi, j'ai noté les passages que vous citez.
J'ai bien envie de continuer à découvrir cet auteur. Un ami m'a conseillé le titre suivant : "La Tante Julia et le scribouillard" (le titre me plaît déjà beaucoup) et il s'agit encore d'une passion amoureuse. Voici un copier-coller de la 4e de couverture : "A dix-huit ans, Varguitas fait mollement des études de droit, travaille un peu à la radio, écrit des nouvelles et est éperdument amoureux de la tante Julia, belle divorcée de quinze ans son aînée. Malgré les obstacles, leur amour triomphera." Marie

Jules a dit...

Emeraude: je t'adore! J'aimerais tellement t'avoir tout près, nous nous ferions de petits débats littéraires toi et moi! ;)

Marie: On m'a aussi suggéré La Tante Julia et ton commentaire me donne effectivement encore plus le goût de me le procurer! Merci!

Anonyme a dit...

Bonjour,

J'ai adoré ce livre. Je n'ai pas pu le lâcher. Il est prenant et m'a donné beaucoup d'émotions.Oui Ricardo devrait réagir et ne pas se laisser faire. Mais l'amour et la passion sont plus puissants.Il est conscient de sa faiblesse ! Un livre qui nous prend et ne nous laisse pas indifférent.
J'adore les histoires de passion, de don complet pour ce qu'on aime que ce soit une personne ou autre chose...

Anjelica a dit...

Bon je pense le noter pour mon challenge 2008 et si ce Ricardo m'énerve et bien on verra en 2008 !

Anonyme a dit...

J'ai adoré l'écriture de Vargas Llosa. Je dirais même que c'est une de mes belles découvertes littéraires de l'année. Et le roman dont tu parles ici m'apparaît digne de cette fougue et de cette lucidité que j'aime chez cet auteur.

Je note!